Bruno Le Maire, ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté Industrielle et Numérique, a présenté le 14 novembre 2023, le cadre de la nouvelle réforme post ARENH (Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique) qui doit prendre fin le 31 décembre 2025.
Ce nouveau dispositif est censé protéger les consommateurs professionnels et particuliers en cas de crise énergétique, mais aussi financer la rénovation d’EDF et accroître sa compétitivité.
Un prix moyen de l’électricité d‘origine nucléaire supérieur à 70 €/MWh…
Qualifié de complexe par l’ensemble des acteurs avec un tarif très éloigné des premières estimations de la CRE (Commission de Régulation de l’Énergie), le nouveau mécanisme des prix du nucléaire repose sur un nouveau cadre de régulation :
- Un prix moyen de référence à 70 €/MWh sur 100% de la production nucléaire contre 42 €/MWh avec un volume de 100 TWh aujourd’hui.
- Un premier palier de régulation dès que les prix de vente sur le marché européen dépasseront 78 €/MWh. Dans ce cas, l’État prélèvera 50% de la rente du producteur d'électricité qui sera redistribuée aux consommateurs.
- Un second palier est fixé à 110 €/MWh avec cette fois 90% de la rente captée par l’État.
- Une révision des niveaux de taxation d’EDF tous les 3 ans.
Quels sont les effets sur la facture des entreprises ?
Avec cette réforme de l’électricité nucléaire, l’État français s’engage à stabiliser la facture et non à la faire baisser.
Nuance qui fait débat puisque certaines corporations dont la CLEEE, association des grands consommateurs industriels et tertiaires français d’électricité et de gaz, estiment que cette nouvelle donne est “redoutablement complexe, entraînant l’impossibilité pour les entreprises d’anticiper leurs coûts et de planifier leurs investissements (...), un grand pas en arrière pour les entreprises françaises”.
Ils tiennent d’ailleurs à rappeler qu’à ces prix-là, aucune industrie française ne serait compétitive.
En effet, pour comparaison, outre-atlantique et en Chine, le prix du MWh d’électricité nucléaire est largement inférieur à 70 €. Là-bas, certains industriels se fournissent à un prix de 35 $/MWh en moyenne.
Une réforme, des polémiques…
Même si certains industriels énergo-intensifs parviennent à obtenir des contrats attractifs, le flou demeure pour les fournisseurs alternatifs. En effet, certains se demandent aujourd’hui quelles seront les modalités d’accès post Arenh 2025 à l’électron nucléaire d’EDF.
Les fournisseurs alternatifs et concurrents d’EDF n’ayant pas été concertée en amont de cette réforme, ils estiment qu’elle pose un problème de concurrence déloyale.
En effet, grâce à ce mécanisme post Arenh reposant sur des contrats à long terme (CfD) sur 10, 20 ou 30 ans, l’entreprise 100% publique EDF risque de s’approprier une trop grande majorité des industriels. Ce qui mettrait à mal de nombreux fournisseurs alternatifs.
Certains vont même jusqu'à dire que cette réforme a été scandaleusement négociée dans l’ombre ou parlent d’impôt déguisé. Dire que cette nouvelle réforme fait débat est sans doute un euphémisme…
Que retenir ?
Au-delà de l'annonce, les modalités d'applications restent encore floues. La visibilité amenée par ce futur dispositif est donc insuffisante pour la majorité du tissu économique français.
Cette réforme a inévitablement besoin d’une plus grande clarté à tous les niveaux avant sa mise en place le 1er janvier 2026.
Notons que l’Union européenne n’a pas encore donné son accord définitif au sujet de la redistribution de la rente sur l’électricité nucléaire.
Au-delà de la nécessaire validation de la Communauté européenne, une consultation publique doit être lancée auprès des acteurs énergétiques français et des parlementaires d’ici l’été 2024. Affaire à suivre de près…
Lecture complémentaire : Qu'est-ce que l'écrêtement Arenh ?